lundi 11 mai 2009

Identité corse et littérature

Une première session de rencontres littéraires s'est tenue à Corte, espace Natale-Luciani, animé par François-Xavier Renucci, sur le thème de l'identité et de ses manifestations polémiques. Ne pas confondre corsitude de l'auteur et corsitude des personnages, produire des oeuvres qui ne parlent pas qu'aux Corses mais sont un miroir qui interroge tout lecteur, le fait réfléchir sans sans jeu de mot, voilà autant de thèmes stimulant. Bien évidemment reste pendante la question politique : y a-t-il expression corsiste authentique qui ne remette pas en cause la position de la Corse au sein de l'ensemble français ? Pour ma part, je sens bien que le positionnement corsiste républicain n'est tenable qu'à condition d'accepter de cantonner tous les éléments de civilisation corse dans un registre régionaliste voire folkloriste. Si l'on veut s'évader du folklore, c'est alors bien la question du détachement corse qui se pose.

3 commentaires:

  1. Monsieur,
    vous évoquez la "question politique" que pose une "expression corsiste authentique". La question me paraît pertinente mais elle comporte le risque de favoriser une partie au détriment du tout.

    Il me semble que les habitants de l'île de Corse, ainsi que les Corses vivant hors de l'île, vivent leurs identités avec autant de force, de complexité, de scrupules ou d'indifférence que n'importe quel groupe humain. La production littéraire corse se ressent de cette diversité identitaire et les expressions corsistes "authentique" ou "républicaine" ne sont que deux cadres parmi d'autres dans lequel se positionnent (ou non) consciemment (ou non) un certain nombre d'auteurs.

    Pour ma part je continue à pense que faire attention à toute la production littéraire corse (en un sens très large) est un gage de lucidité et de plaisir.

    Imaginons une Corse indépendante : la question de sa littérature serait toujours en question, du fait de son histoire marquées par la multiplicité et les mélanges (de langues, de sentiments identitaires, de désirs, etc.)
    Il me semble que nous pouvons regarder, dès aujourd'hui, une littérature corse aussi disparate que vivante et être attentif aux modalités infinies de lecture qu'elle suscite.

    Vous étiez donc à Corte le 15 avril ? Je vous aurais rencontré avec plaisir : ne serait-ce que pour vous poser quelques questions :
    - pourquoi ce pseudonyme de Marc de Cursay ?
    - y a-t-il des ouvrages littéraires corses (en quelque langue qu'il aient été écrits) qui vous plaisent, lesquels, pourquoi ?
    A bientôt, peut-être (j'ai découvert votre blog aujourd'hui ; j'avais acheté votre livre en Corse il y a déjà quelque temps, il faut que je me replonge dedans, beaucoup de vos points de vue me paraissaient vouloir susciter le débat... en avez-vous eu ?)

    Cordialement,

    François Renucci
    http://pourunelitteraturecorse.blogspot.com

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  2. Bonjour,
    Je suis assez d'accord avec vous sur la permanence de la question littéraire corse même dans un contexte de Corse indépendante. En effet, rien ne serait résolu pour autant, en ce que la littérature corse (en langue corse) est bien évidemment récente dans son expression écrite et que sa langue support est en danger (et le resterait même en cas de "grand large" politique). En outre, comme vous le soulignez tout le monde n'investit pas la même chose dans cette littérature et les cadres que j'évoque sont des attitudes "extrêmes" : d'un côté, se contenter d'une littérature modeste et un peu intimidée par l'ombre portée de la littérature française (et par voie de conséquence la tentation de s'en tenir au folklore : livres de cuisine, recueil de chansons, traductions); de l'autre,le culte d'un devenir fantasmé.
    Mon interrogation se limite à questionner le corsisme "républicain" ou le corsisme "politique". En d'autres termes, si la question littéraire demeure quelque soit le cadre institutionnel, en revanche, le corsisme républicain peut-il vraiment promouvoir une littérature dont l'Etat central ne favorise nullement le développement même s'il en a été le déclencheur au XIXè siècle à compter du seconde Empire (auparavant, le bilinguisme administratif français/italien, celui des actes, régnait en maître).
    Comme vous l'avez compris je reste très sceptique et sur l'avenir littéraire (et linguistique du corse) dans la situation actuelle tout comme je doute qu'une indépendance soit la clef du risorgimento du corse.
    Cela étant il s'agit d'une impression et non d'une conviction fortement étayée (qui peut prétendre cela d'ailleurs ?).
    Sur mes goûts littéraire, je me contente de textes en français (je ne cache pas dans mon livre ne pas être corsisant même si j'arrive à le comprendre ou à le déchiffrer): casa rocca de Madeleine Finidori (1949), les chroniques corses de Pierre Dominique, la terre des seigneurs bien sûr de G-X Culioli (je ne suis pas rancunier), l'île sans rivages de Marie Susini ; en revanche m'essayant au polar "corse", Nimu de J-P Santini m'est tombé des mains. Par ailleurs, j'attends avec intérêt la sortie d'ouvrages rédigés en corse mais traitant de sujets indifférents à la Corse. Je suis ouvert à toute suggestion.
    Quant à mon livre (et au site qui va avec), certes il a provoqué quelques réactions la plupart très irritées mais pas de vrai dialogue. Sans doute beaucoup sont-ils trop passionnés ou trop engagés pour lire ce que je dis vraiment.
    Mon pseudo est un clin d'oeil au Marquis de Cursay (dont j'ai tronqué le titre pour en faire un prénom) dont le positionnement politique entre les "nationaux" et les français reste ambigu pendant son commandement en Corse (de 1748 à 1752) dans un environnement lui-même ambigu puisque Gênes est encore propriétaire de l'île et pas seulement formellement.
    Cordialement

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  3. Monsieur de Cursay,
    merci pour cette réponse très précise.
    Mon point de vue "politique" est le suivant : je pense qu'une littérature considérée du point de vue du lecteur peut être un des rouages d'un imaginaire vivant ; je pense à la notion de "société littérarisée" dont parle Yves Citton (voir le billet "Une société littérarisée" sur "Pour une littérature corse" ; cliquer sur le "libellé" "Yves Citton").
    Je n'ai pas encore terminé "Nimu" de Jean-Pierre Santini, mais j'apprécie de nombreux passages, de nombreuses inventions ; vous pourriez préciser votre déception ? cela permettrait de savoir aussi ce que vous attendez d'une littérature corse ?
    Seriez-vous prêt à proposer un "récit de lecture" concernant Marie Susini ou GXCulioli (dont je comprends que vous avez eu à polémiquer avec lui...) ? Quelles pages des ouvrages de ces auteurs aimeriez-vous citer ? Quelles "figures" issues de ces oeuvres corses occupent encore votre esprit et votre mémoire ?
    Concernant les ouvrages en langue corse sur des sujets non corses, il me semble que "San Ghjuvanni in Patmos" de Marcu Biancarelli et "Cheese" de Ghjuvan Maria Comiti font cela (éditions Albiana).
    Je ne connaissais le Marquis de Cursay que de nom, j'ai appris dernièrement qu'il est aussi le premier introducteur de l'imprimerie en Corse (voir l'interview de Vanessa Alberti sur le site des éditions Albiana) : voilà donc un personnage qui a aussi à voir avec la chose littéraire...
    A bientôt ?

    Bien à vous,

    François Renucci
    f.renucci@free.fr

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